mercredi 25 septembre 2013

L'extrême droite, moins rationaliste ? // Le soralien comme monstration de l'humain. // L'ambivalence des Lumières.

RE : Un sous-Cantamessi ouvre son clapet puant


D'abord sur l'antirationalisme de l'extrême droite, qu'entendez-vous par cela, correspondant-fantôme ? Qu'elle va chercher les principes de vie dans la tradition ou le folklore national ou régional plutôt que dans la pratique de l'éthique entendue comme questionnement rationnel de l'impératif hypothétique ? Mais l'obsession des racines ne trouve-t-elle pas allègrement des équivalents anti-rationnels dans les autres courants de pensée ? Vous le savez bien, les manières de démentir sa volonté affichée de rationalisme ne manquent pas, tout comme les manières d'être rationaliste quand on est d'extrême droite.

Pour utiliser d'autres termes : tout raisonnement trouve son fondement dans une axiomatique arbitraire. Si la pensée d'extrême droite a son axiomatique injustifiée, c'est aussi le cas des courants prétendument supérieurement rationalistes.


Deux notes sur Soral :

Premièrement,

Oui, inlassablement, viscéralement, il emploie un vocable identitaire. Il voit des Juifs, des WASP, des Français de souche, des Algériens, etc, avant de voir des êtres humains – et de plus, il ne redevient universaliste et humaniste que pour contrer un tribalisme dont le judaïsme serait l'unique représentant comme le prouveraient des écrits de l'Ancien Testament et surtout du Talmud.

Je trouve cette façon de qualifier les humains grossière. Sa façon de parler souffre de cette insuffisance commode qui est celle des gens et qui consiste à voir des Juifs, des Corses, des Kabyles ou des Chinois plutôt que des hommes. De mon point de vue, son discours en est rendu alourdi et grossier.

Mais il faut faire la différence entre le descriptif et le normatif. Quand les gens disent, « les Arabes sont comme ceci », « les Juifs sont comme cela », « les Corses doivent devenir indépendants », quand un Soral propose que « les Chrétiens et les Musulmans fassent une alliance sacrée », etc, ils sont normatifs. Le fait est que : si Soral a cette mentalité, la plupart des gens l'ont aussi, dont ses ennemis. On peut donc penser à retirer une dimension descriptive des discours de cet écrivain. Il s'agirait de constater que Soral est viscéralement identitaire dans son vocable, et de se dire que les « sionistes et soumis » qu'il fustige sont aussi concernés par cette tendance naturelle, qu'ils ne sont pas forcément capable de la surpasser et que donc une partie d'entre eux ont une logique cognitive proche de cet homme.

Car n'est-il pas vrai que les hommes se répandant souvent dans l'exclusion, l'intolérance et le préjugé, quel que soit leur sentiment d'appartenance, quel que soit leur livre des valeurs ? J'ai nommé l'intégrisme, que j'entends comme une lecture simple d'un livre des valeur quelconque qui permet la haine, l'exclusion ou la violence.
N'est-il pas sensible que des humanistes et des progressistes font actuellement preuve de la plus grande des intolérance à l'égard de concitoyens traditionalistes, régionalistes ou nationalistes tandis que ces derniers ont eux-même tout le loisir de se complaire de la tradition d'exclusion de l'autre qui est leur héritage ?
N'est-elle pas parfois palpable, cette douce tendance à l'intégrisme laïcard chez une Caroline Fourest ou un Vincent Peillon ? La Révolution française, après n'avoir été que matérielle, doit encore urgemment se faire dans les esprits, nous dit notre ministre de l'éducation, clairement contre les religions, qui ont d'ailleurs comme remarquable substance élémentaire la misogynie, au sens de la féministe androgyne.
Quid d'un Guy Millière et sa propension immodérée à l'intégrisme néoconservateur hérité des doctrines Wilson et Bush ? Imposer, par la force militaire et son lot de crimes injustes, à des pays incapable de se défendre, sa propre vision de la démocratie, n'est-il pas du même niveau intellectuel et moral que la démarche démente d'un Ben Laden ?
Ne sont-ils pas explosifs quand ils sont médiatisés, les intégrismes sionistes derrière les actes de violence d'une Ligue de Défense Juive ou des prêches de certains rabbins américains ? N'y a-t-il pas une possible forme civilisée et larvée d'intégrisme juif ou philosémite qui a tout le loisir de se glisser dans l'éthique et les mots des intellectuels, présidents d'association, hommes politiques ou artistes qui sont concernés par un fort sentiment identitaire ou un zèle à propos de la question juive ou israélienne ? 
Quant aux intégrismes musulmans et chrétiens, pourquoi les commenter alors que les médias n'ont déjà d'yeux que pour eux...

Pensons donc à la dimension descriptive du soralisme : les ennemis « sionistes ou soumis au sionisme » de Soral ont parfois sa propre logique cognitive d'individu borné aux racines, une faiblesse humaine commode, populaire et intemporelle. De ce fait, ses ennemis ont tout le loisir d'agir un peu comme il le décrit lui-même.

Deuxièmement,


Oui, l'historienne Sigaut et Soral sont anti-Lumière, ce qui reviendrait à fustiger certains progrès dont pourtant ils bénéficient et vantent les mérites dans d'autres circonstances (contre la menace rétrograde "sioniste" généralement). On vit avec ses contradictions. Mais Soral fait plus que vivre avec ses contradictions : il a plusieurs fois, en conférence, ou sur son canapé rouge, parlé en terme d'ambivalence et de dialectique à faire concernant les Lumières et la Révolution française, lui qui a l'habitude de se mettre dans des pétrins où il doit sortir de son chapeau magique la complexité d'un monde qu'il a lui-même simplifié.

En effet, il explique à un public parmi lesquels comptent des régionalistes, des royalistes et des libéraux de droite dure, qu'il est jacobin, républicain et pro-fonctionnariat. Il fait l'éloge d'auteurs hautement progressistes ayant soutenu la Révolution française tels que Rousseau et défend l'héritage révolutionnaire - généralement contre l'ennemi "sioniste" présenté comme tribal et racialiste, donc rétrograde et dangereux.

Et par ailleurs, aux côtés de Sigaut, dans une grille de lecture marxiste, il est virulent à l'encontre des Lumières présentés comme les complices d'une révolution qui n'aurait été voulue que par des bourgeois et qui n'aurait profité qu'à leur propre classe sociale. Soral pointe du doigt ce qui serait un effet pervers majeur de la Révolution française : une permission de la religion de l'économisme, du scientisme et du progressisme, en offrant à ces dogmes nouveaux, sur un plateau d'argent, tous les outils nécessaires.

Après avoir entendu sa critique massive de la Révolution française, on se demande s'il ne préfère pas le catholicisme d'Etat à la république. Eh bien oui et non car à l'humanisme catholique coexista l'Inquisition, il le sait très bien et le dit. A la république : il dit oui et non ; au catholicisme d'Etat : il dit oui et non. « L'anti-Lumière » Soral n'est pas si « anti » que cela. C'est un conférencier qui explicite de temps en temps l'ambivalence et la dialectique (aux crânes rasés et aux banlieusards réunis), ce qui en soi est plus un mérite qu'une tare, cela va de soi.

D'ailleurs à ce propos, il pourrait donner à Mézigue des leçons qui lui seraient bien utiles pour qu'il cesse de traiter ses concitoyens réactionnaires de façon si expéditive. Pas de démocratie possible quand on retire à un concitoyen son ambivalence.

2 commentaires:

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